mardi 17 janvier 2012

I wish I was there

Aujourd'hui, je vais vous raconter la vérité.

Je suis rentrée depuis plus d'une année de ce voyage, je n'ai pas laissé de mot ici depuis un bout de temps, je n'y ai pensé que dernièrement, mais j'ai globalement laissé mes souvenirs se décanter peu à peu.

Le retour a été très difficile, je commençais à m'acclimater à ce pays, j'y ai grandit, je suis devenue quelqu'un d'autre en l'espace de 14 mois, qui m'ont semblé 10 ans. Quelqu'un d'autre qui a néanmoins conservé son lourd passé.

Je revenais en France avec l'optimisme de retrouver mes proches, mon pays, et tout ce qu'il offre et qui me manquait. En réalité, je n'ai pas retrouvé ce que j'avais laissé, je suis revenue sans rien y reconnaître. J'avais perdu tous mes repères, j'ai redécouvert les miens sous un autre jour, et malheureusement ce ne fut pas toujours en bien.

Je me suis sentie si décalée, si peu à ma place, ne sachant pas bien quoi faire, que je ne me sentais plus chez moi. Et pourtant, j'avais tellement hâte de retrouver ma Bretagne natale, Nantes, mes amis. J'ai eu l'impression d'arriver dans un pays étranger, trop changée pour comprendre les miens, et pour qu'eux me comprennent. Et encore aujourd'hui.

Ce genre de voyage change à jamais une personne. Je suis incapable de le raconter, il y a tout et rien à dire, c'est l'histoire d'une vie dans une vie, quelque chose que l'on ne peut partager. Ce qui est important pour moi, ne le sera pas pour toi. Incompréhension. Alors finalement on cesse d'en parler. Cette histoire est mon sang qui bouillonne, mon coeur qui bat, mon esprit qui vole, et il n'y a que moi qui peut saisir l'intégralité de tout cela. Parfois les mots sont désuets, inutiles. Parfois, car relire entièrement ce blog, l'histoire de mon voyage, m'a remémorée tant de sentiments et de situations ! Je suis heureuse de l'avoir écrit, et bientôt sera peut-être le moment de le poursuivre.

Cette nuit je me suis baignée dans une insomnie. Mes pensées étaient chaudes, elles sentaient le bois humide, l'au(l)ne du printemps. J'ai revu cette cabane au milieu de l'érablière, j'ai senti cette odeur de bois chaud qui se dégageait du vieux poêle artisanal. Celui-là même qui s'éteignait au milieu de la nuit, qui entraînait des réveils douloureux à près de zéro degré dans cette cabane construite par mon hôte.
La nuit tombée je me promenais dans l'immense bois, éclairé par la lune, évitant les restes de neige. Les chaudières, récoltant l'eau d'érable prête à être bouillie pour en faire du sirop, étaient accrochées aux érables. Près de 2 000 seaux dont on entendait à tour de rôle la cadence de ces gouttes précieuses, qui une à une tombaient en pluie. Une pluie de goutte, les arbres vivent, éjecte leur précieuse eau pour notre plus grande joie.

Les lendemains matins ces seaux étaient pleins. Je chaussais mes bottes et m'en allait courir dans la neige pour aller récupérer cette eau destinée à bouillir. Chaque goutte est précieuse, mon seau dans lequel je transvasais l'eau des autres seaux était lourd. J'en renversais parfois avec une certaine culpabilité. Je courais dans cette neige qui m'arrivait jusqu'aux mollets, d'arbres en arbres, dans le froid ensoleillé.


J'aimerais tellement pouvoir y retourner, bientôt ce sera la saison des sucres, de récolter l'eau, et de la faire bouillir dans cette machine énorme qu'il faut alimenter en bois 4 heures durant, pour obtenir 1 baril de sirop.

Je ne sais pas si je pourrais prochainement le faire, en tout cas ce que je sais, c'est que j'ai déposé un dossier pour étudier à l'université de Sherbrooke l'an prochain, et j'aurais la réponse dans quelques mois. A vrai dire je n'ai aucun doute sur l'acceptation de celui-ci, mais il faut garder une infime réserve, au cas où :-).

Look at your childhood behind you, it's so far away, it's so far away